vendredi 5 novembre 2010

Enregistrement de la séance : «Le passage du public au commun»

Les enregistrements de la première séance intitulée «Le passage du public au commun » du séminaire « Du public au commun » faits mercredi 03 novembre, 2010 à la Maison des Sciences Économiques, Paris.

L'intervention d'Antonio Negri (22:42)
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L'intervention de Pierre Dardot (27:53)
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Le premier round de discussion (30:59)
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Le deuxième round de discussion (29:28)
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dimanche 31 octobre 2010

Proposition Antonio Negri pour la séance du 3 novembre



Le commun semble être en Occident le lieu du non-droit. Non seulement il n’existe pas comme concept, mais il n’a pas de statut comme res. Nous reprenons au biologiste Garret Harding (« The Tragedy of Commons », in Science, 1968) une parabole qui illustre ce genre de lecture, et que cite à son tour le juriste italien Ugo Mattei :

Le commun entendu comme ressource librement appropriable, c’est-à-dire comme ressource commune, est une idée considérée comme inimaginable et néfaste parce qu’elle stimulerait les comportements opportunistes d’accumulation qui auraient tôt fait d’en déterminer la consomption définitive. Quand on raisonne de cette sorte, on considère comme réaliste l’image d’une personne qui, invitée à un buffet où une grande quantité d’aliments serait librement accessible, se jetterait sur celui-ci en cherchant à ingurgiter la plus grande quantité possible de calories au dépens de tous les autres, c’est-à-dire à consommer le maximum de nourriture en un minimum de temps, selon un simple critère d’efficacité. Dans un tel modèle anthropologique, le sens de la limite, créé par le respect éprouvé à la fois à l’égard de l’autre et à l’égard de la nature, est ainsi exclu a priori : il est irréaliste dans la mesure où il est fondé sur une vision scientifique purement quantitative.

J’aimerais à proposer un certain nombre de courtes indications pour expliquer ce type de modèle et m’y opposer à mon tour.

dimanche 24 octobre 2010

Contribution pour la séance du 3 novembre de Pierre Dardot

La question du passage

Pierre Dardot

« Du public au commun » : le titre du séminaire a tout d’une annonce programmatique, ce qui est plus encore mis en évidence par le thème des deux exposés de cette première séance, « Le passage du public au commun ». En effet, avec le terme de « passage », ce qui est encore implicite dans le titre devient explicite : on a là l’idée, non d’un passage qui serait déjà en cours ou d’un processus déjà engagé, mais bien à mon sens d’un passage qui dessine les contours d’une tâche en ce qu’il définit ce qui est souhaitable et même nécessaire, ce qui mérite par conséquent d’être promu au rang d’objectif par et pour l’activité pratique. Entendu ainsi, le titre veut dire : il faut passer du public au commun, de quelque manière qu’on entende ce « il faut » et quelque précaution que l’on prenne pour le distinguer d’un devoir-être abstrait. La question préjudicielle, celle qui se pose préalablement à la question du ou des modes du passage (comment effectuer ce passage ?) est donc la question de la nécessité d’un tel passage (pourquoi faut-il passer du public au commun ?). Mais on peut encore aller au-delà, jusqu’à se demander ce que présuppose le fait même de s’interroger en termes de « passage ». On pourrait se demander quel rapport se trouve par là impliqué entre le point de départ du passage et son aboutissement ou sa fin. De toute évidence, si un passage est possible, c’est que le rapport ne peut pas être un rapport de pure et simple confrontation ou d’exclusion mutuelle. On ne saurait en effet se proposer de « passer du privé au commun » tant le rapport entre les deux est justement d’opposition directe, alors qu’on peut très bien se proposer de substituer le commun au privé, mais à condition d’être conscient que cela même présuppose la destruction du privé, ce qui est tout, on en conviendra aisément, sauf l’amorce d’un passage. La question vaut d’autant plus la peine d’être posée que le public semble à première vue s’opposer également au privé, c’est-à-dire avoir le même contraire direct que le public, de sorte qu’il paraît assez tentant de rapprocher le commun et le public jusqu’à les rendre indiscernables l’un de l’autre.